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 Cover to Cover par Ho Tam: la publication d’artiste comme pratique archiviste  
candace mooers | Cover to Cover | Cover to Cover | Ho Tam
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par Candace Mooers.

L’auto-publication est avant tout une revendication d’espace. Il n’y s’agit pas de demander la permission d’un comité de juré-e-s ou de se faire examiner par des pair-e-s ou des éditeur-trice-s. Il y est plutôt question d’une occurrence d’autonomie, émanant du désir de s’impliquer dans le monde selon des termes propres à soi. La qualité DIY qui informe l’auto-publication est ainsi ancrée dans l’autodétermination : elle n’attend pas qu’autrui œuvre pour nous.

Ayant exposé à articule en 1995, Ho Tam revient sur les lieux avec une exposition consacrée à sa pratique de publication. Le projet intitulé Cover to Cover combine des photographies, des vidéos, des affiches issues de ses ouvrages publiés ainsi qu’une collection de livres. Ho Tam nous fait part de sa position. « Dans mon travail, j’explore souvent mon identité d’homme asiatique gai et vivant en Amérique du Nord », écrit-il de Vancouver, « ces livres s’intéressent au ‘comment’ de mon insertion dans le monde en tant qu’artiste ».

Né à Hong Kong, Ho Tam a étudié à Toronto et travaillé dans les domaines de la publicité et de la psychiatrie communautaire avant de se tourner vers l’art. Il débute son parcours en collaborant avec d’autres artistes à la conception et à la distribution indépendante de leurs publications, puis s’engage dans une pratique artistique centrée sur la fabrication de ses propres livres d’artiste. « La publication », dit-il, « est devenue ma pratique artistique primaire et mon mode préféré de création et de distribution d’œuvres ».

Du concept initial et en passant par le texte écrit et la sélection des œuvres, Ho Tam a produit plus de 30 projets individuels. Il a eu l’occasion de discuter de son rôle d’artiste-éditeur lors de l’une de ses récentes visites à Montréal et formulé le constat qui suit, « les publications sont très intéressées par l’affirmation de l’autonomie artistique à travers l’usage de la publication en tant que mode d’archivage pour la pratique de l’artiste ».[1]

Si certaines de ses œuvres sont disponibles en ligne, ou encore abritées dans les collections d’arts de plusieurs bibliothèques, l’exposition Cover to Cover est une rare opportunité de rencontrer les travaux de l’artiste rassemblés dans un corpus couvrant une période de plus de deux décennies. Les œuvres de ses débuts en particulier sont réminiscentes des fanzines et emploient des techniques d’impression et de reliure diversifiées, dont l’impression offset, la sérigraphie ou les technologies d’impression des plans architecturaux (blueprint).

Ses publications les plus récentes incluent les projets digitaux Hotam et Poser disponibles pour impression sur demande. L’on y retrouve des photographies ludiques faites comme des publicités de magazines. Dans le style Pop art, elles donnent à voir des images répétitives de l’artiste lui-même (dans Hotam) ou encore de personnes qu’il rencontre dans la rue (dans Poser). Ces œuvres récentes portent une invitation à réfléchir sur l’usage des matériaux visuels dans le domaine de la publication et sur les enjeux actuels de la reproduction des photographies issues de banques d’images commerciales. Le geste d'encadrement de Ho Tam nous rappelle ainsi que les images existent pour nous raconter des histoires, sur nous-mêmes, sur nos attentes et sur nos désirs. Des mises en scène nous demandent qui devient un meme ? Mais encore, qui a la possibilité de figurer sur la couverture d’un magazine ?

Ces publications récentes constituent également des expérimentations dans le domaine du design graphique digital. Ayant pour point de départ le projet d’une série de photographies, l’artiste « décide de photographier toutes les personnes du monde, cela aboutit à une étude en typographie ». Cette déclaration de l’artiste est un testament au type d’heureux hasard qui peut se produire lorsque nous jouons avec les images. Dans les mots de la graphiste Lynda Barry, elle-même décrivant son procès de travail : l’image se met en place.[2]

Cover to Cover touche à un large éventail d’idées : des récits personnels, des conceptions culturelles ainsi que des notions issues de l’ethnographie et des études du genre. Connu pour son exploration des identités masculines asiatiques, il n’est pas difficile effectivement de comprendre le corpus de l’artiste comme une réaction aux stéréotypes homogènes. Commentant son aptitude à subvertir le gaze du/de la regardant-e, l’artiste écrit, « Parfois, les ‘magazines’ sont vus comme une réponse aux contre-réactions aux représentations erronées et aux stéréotypes des médias de masse”. Il insiste néanmoins que chaque œuvre tient seule en elle-même, et ne se limite pas aux enjeux de race, de masculinité et d’identités sexuelles. L’exposition Cover to Cover, qui inclue les projets Hotam et Poser, nous amène à réfléchir au rôle de la publication comme pratique. Par ailleurs, en tant qu’archive, chaque publication est l’extension de la vie d’une idée à l’ère du digital éphémère. L’artiste considère que c’est un appel à « inviter l’audience à la contemplation de la contradiction et de la complexité de notre existence propre dans le contexte de notre époque ».   

 

 

[1] Lors d’une discussion présentée à Artexte, dans le contexte d’une co-présentation de la foire du livre Queer entre les couvertures et de Qouleur lors du festival de fierté alternatif Pervers/cité en 2016.

 

[2]   Barry, Lynda. 2008. Judging a book by its cover. Entrevue avec Bill Douglas. Harbourfront Centre,Toronto, Ontario, October 26.

Date:
Friday, February 9, 2018 - 18:00 to Sunday, March 11, 2018 - 17:00
 Artist Publishing as Archival Practice: Ho Tam's Cover to Cover  
candace mooers | Cover to Cover | Cover to Cover | Ho Tam
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by Candace Mooers.

Self-publishing is about taking up space. It's about not asking permission from a committee of jurors or peer-reviewers or editors. It's about autonomy; it stems from wanting to engage with the world on one's own terms. Its ‘do-it-yourselfness’ is rooted in self-determination, and in not waiting for someone else to do it for you.

Ho Tam returns to articule, since his last show at the gallery in 1995, with an exhibition that focuses on his publishing practice. Combining photographs, video, posters of pages of his publications, as well as a book collection display, Ho Tam shares with us his perspective. “In my work, I often explore my identity as a gay Asian man living in North America,” he writes from Vancouver. “The books are about how I, as an artist, insert myself into the world.”

Ho Tam was born in Hong Kong, educated in Toronto, and worked in advertising and community psychiatry before turning to art. He began making books with other artists and distributing their work independently before making his own artist books the centre of his art practice. “Publishing has become my primary art practice and my preferred way of creation and distribution of work,” he says.

From the initial concept, to the written text, to the selection of artworks, Ho Tam has produced more than 30 solo works. He spoke to this role of artist as publisher at one of his recent visits to Montreal: “The publications are very much about the assertion of artistic autonomy through the use of publishing as an archive of the artist's practice.”[1]

While some of his works can be found online or housed in art library collections, Cover to Cover is a rare presentation of the artist's collected works, spanning more than two decades. His earlier art books resemble zines, employing various printing and binding techniques, such as offset, screen-printing or architectural blueprint technology.

Recent publications include the digital print-on-demand Hotam and Poser magazine series, which include playful photos designed like glossy advertisements. In pop art style, there are repetitive images of the artist himself (in Hotam) or of people the artist meets in the street (in Poser). There is an invitation, in these recent works, to consider print publications' use of visuals, and the now common tendency to reproduce stock photos. We are reminded in Ho Tam's framing that pictures tell us stories about ourselves, our expectations, and desires. Staged scenes ask us who gets to be a meme? Who gets to be on the cover of a magazine?

These recent publications are also experiments in digital graphic design. Originally derived from a photo series, the artist “set out to photograph all people of the world and ended up with a study in typography.” Ho Tam's statement is a testament to the kind of “happy accident” that can occur when playing with pictures, as fellow graphic artist Lynda Barry names her process when an image falls into place.[2]


Cover to Cover displays a wide range of ideas: personal stories, cultural conceptions, ethnography, and gender studies. Known for his presentation of Asian male identities, it's hard not to see the artist’s body of work as a reaction to homogeneous stereotypes. “Sometimes, the 'magazines' are seen as a response to the counter reaction to the misrepresentation and stereotypes in mass media,” he writes in regards to his ability to subvert the viewer's gaze. Yet he insists that each work stands on its own, and is not limited to questions of race, masculinity or sexual identities. Cover to Cover, including his more recent publications Hotam and Poser, enables us to consider the role of publishing as practice. As an archive, each publication extends the life of an idea in an ephemeral digital age, and, in Ho Tam's words, provides a call to “invite the audience to contemplate upon the contradiction and complexity of our very existence in our time.”

 

 

[1]  The artist talk was co-presented by Artexte, Queer Between the Covers Bookfair, and Qouleur during the Pervers/cité alternative pride festival in 2016.

 

[2]  Barry, Lynda. 2008. Judging a book by its cover. Interview by Bill Douglas. Harbourfront Centre,Toronto, Ontario, October 26.

Date:
Friday, February 9, 2018 - 18:00 to Sunday, March 11, 2018 - 17:00